La vallée de l’étrange
Dans un avenir proche, une entrepreneure québécoise réussit à mettre en marché des petits robots, qui ont l’apparence d’enfants, capables d’apprendre et d’évoluer en fonction des outils d’apprentissage que leur fournissent leurs propriétaires. Ces objets deviennent rapidement populaires et, un peu à la manière d’un enfant biologique ou d’un animal de compagnie, ils développent des compétences et deviennent de plus en plus « humains ». Devant ce succès, des groupes contestataires se forment, accusant la compagnie qui les produit de provoquer ou d’encourager la pédophilie, entre autres. Les jouets sont détruits, leurs propriétaires traqués et harcelés.
Loin de la clameur du monde, Sim, un modèle 5033, est l’un de ces compagnons, adopté par un fermier doté de patience et d’un sens inné de la pédagogie. Entouré de Choco le chien et de Filsdejean-Poule478 (une poule, on l’aura deviné), Sim s’éveille et devient, sous nos yeux, un petit garçon. Suite à un événement bouleversant, Sim n’a d’autre choix que d’entrer dans la forêt pour fuir la violence du monde. C’est là le tour de force de J. D. Kurtness. Elle avait su nous faire éprouver de la sympathie pour une tueuse en série dans De vengeance, elle nous avait transmis la nostalgie d’une baleine dans Aquariums, voilà qu’elle nous fait tomber en amour avec un petit garçon artificiel, un Pinocchio des temps modernes.
Dans ce roman qui prend des airs de fable, la technologie rencontre la nature, la bonté de certains ne peut pas tenir face à la cruauté des autres, et les humains ne sont pas faits que de chair et d’os.
Pour écouter J. D. Kurtness nous parler de La vallée de l’étrange.
Il usait ses mains. La plupart des légumes poussaient. Il aurait été content si le maître avait été là pour les voir. Sim apprenait que le succès, quand on est seul, est sans joie. Choco s’approchait de lui à l’aube, quand la brume flottait encore sur la terre humide. La chienne s’assoyait près de lui et ils regardaient le soleil monter ensemble. Il savait que c’était inutile, mais Sim ne pouvait s’empêcher d’enregistrer une image de chacun de ces matins, qu’il examinait quand il se sentait perdu. Il pleurait, mais tentait d’arrêter parce qu’essuyer ses larmes était douloureux pour ses paumes. Il savait qu’il était sur une fausse piste, mais il ne savait pas comment sortir de cette boucle. Il n’avait pas d’instruction à ce sujet. Peut-être devrait-on le réinitialiser mais la perspective de perdre les souvenirs du maître lui faisait rejeter cette option, et tout faire pour éviter d’être capturé.
Prix littéraires
- Prix voix autochtones 2024 | Récit et fiction en français
- Prix des Horizons imaginaires 2024