Orfeo
Comment expliquer la fascination qu’exerçait autrefois le castrat, le musico des Italiens ? Nostalgie de l’androgynie mythique, de cette condition initiale où l’humain est un être avant que d’être homme ou femme ? Ivresse des hauteurs où la voix atteint la plénitude ? Virtuosité des partitions ? Voilà que, formé par la Signora, vieille musicienne excentrique, surgit un jeune homme capable de concilier les exigences techniques et la musicalité en vertu de laquelle la voix humaine, en récital ou à l’opéra, parvient à traduire la vie intense de l’âme. Critique musical et lui-même ancien élève de la Signora, Weber prend en charge Orfeo dans l’espoir de l’amener au sommet de son art. Pour cela, il faut passer l’épreuve des concours, déjouer des collusions, protéger une voix dont l’extrême beauté est aussi redevable de sa fragilité. Il ne sait pas alors à quel point l’entrée d’Orfeo dans sa vie la bouleversera. Il n’est pas alloué à tous les écrivains d’écrire un roman musical. Celui de Hans-Jürgen Greif se glisse entre l’intention et la voix, épouse les partitions, restitue les délicatesses qui, dans le phrasé, dans le dialogue avec le piano, dans l’émotion directe, font de l’humain l’instrument dont on dit parfois qu’il est le plus beau.
Quand Weber retira les mains du clavier, les notes résonnèrent dans la pièce pendant quelques secondes encore. L’émotion du contact direct avec cette voix l’empêchait de parler. Il entendit sa propre respiration comme un sifflement, regarda Orfeo : le musico se tint immobile quelques instants, frais, sans signe apparent de fatigue, puis se tourna vers Weber.
Prix littéraires
- Prix littéraire du Salon international du livre de Québec 2004
- Prix France-Québec, finaliste 2003