La volière
D’abord un nain, clown jaune ayant passé une mauvaise nuit. Puis la promesse que clame un prospectus : « Pour devenir riche, vous n’avez qu’à savoir mon nom ! » Être riche, voilà qui permettrait à un traducteur convaincu de s’être trompé sur tout, sa femme en particulier, d’enfin devenir quelqu’un. Et d’écrire le livre dont il rêve depuis si longtemps. « Écrire. Devenir autre chose. Abandonner l’idée du passé. » Mais voilà, incapable de ne pas croire au désastre, « le traducteur ne se mettrait jamais vraiment à l’écriture de son roman tant qu’il ne saurait pas s’il était veuf ou séparé, cocu ou assassin, bourreau ou victime ».Roman de l’absurde, fable pour adulte à l’ère des travailleurs autonomes, le premier roman d’Annie Chrétien se déroule au rythme de l’angoisse fébrile d’un homme placé en état de siège par des hypothèses fumeuses et un travail qu’il ne comprend guère.
Sa femme fumait-elle ? Comme le reste, elle était devenue une accoutumance ; le traducteur oubliait de se rendre compte de sa présence. Il lui parlait, l’embrassait, faisait bien pire encore, sans vraiment porter attention à elle. Absent. Craignant d’en être à sa toute première crise d’amnésie, il tira une bouffée avec méfiance. Aucun malaise, pas de nausée.