La seule chose qui intéresse tout le monde
En 2098, un agent suédois travaillant pour l’Institut des sciences comportementales de la Parakaar est dépêché au Québec pour faire l’évaluation de la premika du très puissant Théodore Désilets, dont la fortune personnelle est évaluée à trente-six milliards de nouvelles roupies. En quelques déplacements ultrarapides, grâce à un réseau de transport planétaire performant, l’agent arrive à destination et rencontre Angèle, un modèle d’androïde doté d’une intelligence artificielle dont on craint qu’elle soit devenue « humaine ».
Le protagoniste de La seule chose qui intéresse tout le monde est chargé d’évaluer les premikas produites par la compagnie Parakaar pour déterminer leur degré d’humanité. Il s’appuie pour ce faire sur une série de tests destinés à détecter et à protéger ces entités devenues trop intelligentes pour leur propre bien. Il doit, de façon non équivoque, évaluer qui est humain et qui ne l’est pas. Ce qu’il découvre, et ce qu’il met à nu, relève d’une réflexion fondamentale sur la nature profonde de l’existence.
Grâce à un voyage dans l’avenir, en observant avec acuité et sans complaisance les comportements de ses semblables, François Blais imagine un monde unifié par le savoir, porté par des innovations absolument sensationnelles et pourtant incapable de se soustraire aux plus viles pulsions humaines. Si l’auteur est connu pour son humour grinçant et son imagination s’attachant aux gestes du quotidien, il fait ici une incursion remarquable dans l’univers de la science-fiction, se jouant des codes du genre à sa manière.
Il fit mine de consulter ses notes. En réalité, il pointa discrètement la caméra de son dhaancha sur le visage d’Angèle afin d’opérer une reconnaissance faciale. Il était curieux de savoir de qui s’était inspiré Théodore Désilets pour concevoir l’apparence de cette curieuse premika. La recherche ne produisit aucun résultat. Angèle ne ressemblait à personne de connu. Probablement qu’elle était le sosie d’une ancienne flamme du vieux. Les rares premikas affichant un âge apparent supérieur à vingt ans que l’agent avait croisées étaient des copies d’une épouse décédée, ou alors d’un fantasme refoulé. Un nombre surprenant d’hommes commandaient des gynoïdes à l’image de leur sœur, de leur fille, ou de leur petite-fille. Ou de leur belle-sœur. Les belles-sœurs étaient très populaires. Suresh Singh Sandhu, l’un des vice-présidents de Saagar, possédait une BeeVee à l’effigie de sa mère à l’époque où elle était enceinte de lui.