Femmes d’Apocalypses
Enfermées dans des cages et offertes aux regards des visiteurs, les grandes femmes de l’Histoire et de la mythologie doivent revivre sans cesse leurs tourments et leurs souffrances. Dans ce roman construit comme un guide de musée, dans lequel la narration est celle du guide touristique, le lecteur se transforme en chaland confronté à ces personnages féminins sur lesquels l’univers repose mais dont on oublie trop souvent les douleurs. Ève, Lilith, Salomé, Marie… Ces femmes sont immortelles, prisonnières d’un zoo, à la merci d’humains qui les exploitent sans vergogne, pratiquant sur elles des expérimentations immondes.
Leur sort ébranlera-t-il le visiteur, auront-elles la chance de s’évader pour, enfin, accomplir pleinement leur destin ?
Pour écouter Josée Marcotte nous parler de Femmes d’Apocalypses.
La femme dort d’un sommeil qui ne ressemble à rien, couchée par-dessus les couvertures, des amas de tissus enroulés autour des jambes, les membres trop écartés, presque obscène dans toute son étendue. Elle prend sa place, sa pièce, la peau emplit votre vision, puis votre espace, aspire à elle tout l’air respirable. Comment peut-on faire sienne une telle position ? Comme si le corps n’était plus que jeu. Il existe un avalement de chaque instant dans ce relâchement. Un appel. Comme si la limite entre le monde du sommeil et le monde réel s’estompait. Un éclair de possible. Une attraction sourde.
— Respire-t-elle ? demandez-vous au commis de cage.
— Bien sûr, répond-il, visiblement surpris.