Je jette mes ongles par la fenêtre
Ils ont en commun d’être jeunes et de ne jamais se trouver très loin d’une scène, d’une table à dessin, d’un clavier ou d’une caméra. Ils lisent, ils roulent à vélo, ils aiment, ils n’aiment pas, ils font la plonge dans un café et sont conscients que leur quartier, leur vie forment une partie d’un grand tout, bien plus vaste qu’eux et dont il faudra bien un jour songer à prendre soin. Une constante vivacité traverse le premier livre de Natalie Jean. Le propos, il est vrai, l’exigeait : tout ici se livre sur le mode de l’ouverture. Comment ne pas être entraîné dans le sillage d’un personnage qui dit : « La ville est pleine d’odeurs, de couleurs, de gens, ma ville est pleine d’histoires » ? Une fois Je jette mes ongles par la fenêtre refermé, on ne sera pas surpris de retrouver ces histoires au coin de la rue, à deux pas de chez soi, à deux pas d’une idée de bonheur.
Quand j’étais petite, je trouvais qu’être une fille était la chose la plus merveilleuse qui puisse arriver à quelqu’un. C’était comme être un gars, mais en mieux, en plus sophistiqué. Je n’y voyais que des avantages : on flottait plus facilement, on courait aussi vite, on pouvait faire des cabanes, grimper aux arbres, mais en plus jouer à la poupée ou faire du ballet. J’aimais le côté lisse et compact de mon corps dont rien ne dépassait. Je n’avais pas peur de ramasser des vers de terre (à deux cennes du vers), de monter à cheval ou de sauter du gros tremplin. Je pouvais sentir bon et avoir les cheveux longs, enfiler mon jean sale et mon vieux t-shirt ou mettre une robe blanche avec de beaux rubans lilas.